
Les violences intra-familiales sont terrifiantes et difficiles à appréhender. Dans ce livre, Anne-Laure Buffet décrit les mécaniques de ces prisons familiales dans lesquelles s’exerce harcèlement moral et contrôle d’un membre de la famille par un autre. Cet emprisonnement est réalisé à coup de réflexions, de critiques, de dévalorisations et de culpabilisations qui pourraient paraître anodines lorsqu’on les prend séparément mais qui, accumulées les unes avec les autres amènent à la destruction psychique de l’autre.
« Se reconnaître victime pour ne plus jamais l’être ». L’auteure présente l’objectif de ce livre comme un ouvrage de vérité qui présente la situation et qui explique les mécaniques psychiques en jeu dans les situations de violences intrafamiliales et d’emprise. Différentes étapes doivent être franchies par les victimes pour se sortir des griffes de leur tortionnaire, la première étant de reconnaître la réalité des violences exercées par leur conjoint. De nombreuses défenses psychiques, bien compréhensibles, empêchent de voir ce qui se trame, car comme souvent dans les situations de violence, et encore plus lorsqu’il s’agit de violences psychologiques, l’agresseur arrive à convaincre sa victime qu’elle est responsable de son comportement. Dans cette relation biaisée, au sein d’un environnement instable où la victime est la seule à se remettre en question, elle en arrive à s’enfermer elle-même en acceptant la vision déformée qui lui est projetée et en s’accablant de tous les torts.
Sortir de cette prison, c’est non seulement remettre en cause un schéma de pensée dans lequel la victime est convaincue qu’elle doit se dévouer corps et âme pour les autres, mais aussi mettre à jour une vulnérabilité affective et un besoin d’amour et d’attention qui n’a jamais été comblé. L’auteure présente ces obstacles inhérents à l’histoire de la victime qui l’empêchent de se donner de l’importance, de choisir selon ses besoins et ses envies, ou de s’autoriser à être elle-même. Pour être pérenne, la démarche de libération doit s’accompagner d’un suivi en thérapie afin de construire ou reconstruire une identité abimée par la relation conjugale.
L’auteure compare la rencontre avec un emprisonneur à un accident lié à un chauffard avec le choc du traumatisme et la longue convalescence qui suit, à l’exception près que les violences psychologiques ne laissent pas de traces visibles. Ce livre permet de comprendre le vécu des victimes, qui souvent ne sont pas entendues car leurs bourreaux, spécialistes de l’enfumage mental, sont aussi convaincants qu’effrayants. Surtout, l’auteure présente les phases de la libération, qui sera d’abord physique, puis psychique jusqu’à ce que la victime n’en soit plus une, car elle aura réussi à s’émanciper, à se connaître, à s’aimer et à se protéger.